WATTIGNIES 1793

WATTIGNIES 1793

Les préparatifs de la bataille vus par un habitant du village de Dimechaux

Les 15 et 16 octobre 1793, le territoire de Dimechaux fut en partie le théâtre des attaques terribles qui signalèrent la bataille de Wattignies.

C'est de ce village que sortit, dans la seconde journée, la colonne du général Duquesnoy, qui gravit avec autant d'impétuosité que de courage les escarpements inabordables de Souvergeaux.

Un vieillard de 73 ans de Dimechaux, qui, dans sa jeunesse, avait été témoin de cette attaque, nous en a parlé, il y a vingt ans ( 1831), en des termes qui sont encore gravés dans notre esprit.

Les français, dit il, qui n'avaient fait qu'occuper Dimechaux le 15 octobre, pour, de la, canonner les hauteurs de Souvergeaux, y apparurent le lendemain, comme un déluge.

Rien de plus curieux que l'aspect offert par leurs bataillons.

La plupart étaient sans uniformes ou vêtus d'habits disparates, et le plus souvent nu-pieds.

Ils portaient au bout de leurs baïonnettes de grands pains à moitié entamés, qu'ils apportaient de leur pays.

Tous étaient pleins d'enthousiasme, quoique très fatigués d'une longue marche.

Aussi, dans l'intervalle des attaques, ils s'étendaient par terre, et toutes les prairies et les vergers en étaient couverts.

Quand le signal du combat fut donné, vers le milieu de la journée, tous coururent gaiement se ranger sous leurs drapeaux.

Notre villageois, curieux comme le sont tous les jeunes gens de son âge (il avait alors quinze ans), s'était placé sur le haut d'un chêne qui dominait les territoires de Dimechaux, de Wattignies et de Dimont.

Jamais, dit il, spectacle plus imposant ne fut offert aux regards de l'homme.

Il vit, lorsque le soleil chassa devant lui le brouillard épais qui l'avait jusque la voilé,scintiller les armes de plus de 20000 hommes, groupés par bataillons sur les différents replis des coteaux si accidentés qui se trouvent en ces lieux.

Un même cri, celui de : " En avant ! en avant ! " proféré par nos jeunes volontaires, impatients de combattre, retentissait à chaque instant sur toute la ligne.

Bientôt cette masse s'ébranla, au chant de "La Marseillaise" et du "ça ira",les musiques et les tambours formant l'accompagnement, et le canon marquant la mesure.

Le général Jourdan et le représentant du peuple Carnot, à gauche, ainsi que le brave Duquesnoy, à droite, s'avançaient à cheval en tête des colonnes, leurs chapeaux au bout de leurs épées.

Trois fois l'agression recommença avec des circonstances on ne peut plus meurtrières, et notre campagnard, dans son ignorance des choses, ne comprenait pas comment des hommes eussent pu montrer autant d'audace et de mépris de la mort.

Il ne savait pas, ce bon vieillard, que ces hommes composaient une armée de fanatiques, qui se regardaient comme les instruments du Ciel dans la grande oeuvre moderne de la régénération humaine, comme les missionnaires sacrés, les champions prédestinés d'une vaste évolution sociale, appelés non seulement à défendre la liberté d'une patrie menacée, mais encore à porter la lumière, la foi et l'espérance aux nations de la terre !

Elle furent bien sublimes ces premières batailles de la République, ou l'on vainquit en chantant !

Combien leur récit ne doit il pas nous émouvoir, nous surtout qui avons hérité de la gloire et des droits conquis par tant de coeurs généreux ! 

C'est ce que nous avons éprouvé en écoutant le bon vieillard de Dimechaux et en parcourant les champs de Wattignies.

 

Texte tiré du livre "Recherches historiques sur Maubeuge et son canton" par Zéphyr Piérart édité en 1851.

 



28/07/2015
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